UNE VISION DE RUPTURE POUR L’EDUCATION ET LA FORMATION AU TOGO
Contexte
Le modèle d’éducation en vigueur au Togo, tout comme dans plusieurs pays francophones, est hérité de la colonisation avec une forte domination de l’enseignement. Le système d’enseignement est élitiste et le modèle de réussite n’est pas tourné vers le développement endogène, mais dirige la réussite vers la capitale et la migration vers l’occident.
Fondamentalement, le développement n’est pas lié à bonne éducation et à l’excellente formation des citoyens, mais tourné vers les échanges et le commerce des ressources minières et agricoles. Plusieurs décennies plus tard, le développement n’est pas au rendez-vous.
Face à cette situation, des réflexions menées dans le monde syndical en 1975, ont conduit à la réforme de l’enseignement qui a esquissé le citoyen modèle dont le profil est « un citoyen sain de corps et d’esprit et capable de transformer son milieu ». En fonction de la production de ce profil type, il a été proposé un système d’enseignement à quatre niveaux : le premier Degré (préscolaire et primaire), le deuxième Degré (premier cycle du secondaire), le troisième Degré (Deuxième cycle du secondaire) et le quatrième Degré (l’enseignement supérieur).
La particularité du système proposé est d’ancrer l’enseignement dans son milieu, un milieu essentiellement agricole avec la création des CEA (collèges d’enseignement agricole), de promouvoir les valeurs et surtout de se financer.
En 1991, la conférence nationale souveraine (CNS), ayant pris conscience que la réforme de 1975 n’ayant pas été mise en œuvre, notamment la disparition des CEA au profit des CEG (Collèges d’enseignement général), elle a proposé l’organisation des états généraux de l’éducation. Ces états généraux ont été organisés, mais les décisions qui en sont les fruits n’ont pas mieux prospéré que les décisions de la CNS.
Plus tard en 2014, de nouveaux états généraux ont été envisager afin de trouver des solutions aux problèmes liés à l’éducation et à l’enseignement au Togo. Un comité préparatoire a été mis en place et a entamé les travaux préparatoires. Le projet d’organisation des états généraux n’a pas abouti et aucune explication n’a été fournie aux Togolais.
Actuellement, un plan sectoriel fait office de plan stratégique de développement de l’éducation et le système est organisé en secteurs (enseignement général, enseignement technique et professionnel, enseignement supérieur et recherche et alphabétisation.) Le système d’enseignement est organisé en trois niveaux : préscolaire, primaire, secondaire et supérieur.
Le Togo dispose d’un plan sectoriel de l’éducation (PSE) qui a été endossé en 2010 en vue d’atteindre, à l’horizon 2020, la scolarisation primaire universelle de qualité. En 2012-13, un diagnostic sectoriel du système éducatif togolais (RESEN) a été réalisé, permettant de réviser le plan sectoriel de l’éducation et de disposer d’un nouveau PSE pour la période 2014 – 2025 ainsi que d’un plan d’action triennal budgétisé (PATB) 2014-2016. La situation éducative au Togo ayant évolué ces dernières années avec les réformes curriculaires, la politique des sous-cycles, la politique d’alimentation scolaire, la politique enseignante, etc. Le Gouvernement togolais a souhaité réviser son PSE et faire un nouveau point sur les avancées réalisées afin d’identifier les freins et les nouveaux défis qui restent à relever pour améliorer la performance du système éducatif en lien avec le Plan National de Développement (PND) et les objectifs de développement durable (ODD). L’actualisation du PSE s’explique aussi par la nécessité de prendre en considération les engagements pris par le Gouvernement togolais aux niveaux communautaire, continental et international, notamment avec : (i) Les réformes de L’UEMOA, (ii) L’agenda 2063 de l’Union Africaine, (iii) la stratégie continentale de l’éducation 16/25, (iv) La Stratégie 2024 pour la Science, la Technologie et l’Innovation pour l’Afrique, (v) le programme 2030 des Nations-Unies.
En accord avec les partenaires techniques et financiers, il a été décidé durant la revue sectorielle de mai 2017, de mettre à jour les documents de stratégies sectorielles (RESEN) afin de réviser le plan sectoriel de l’éducation et d’élaborer un nouveau plan d’action triennal budgétisé 2021 – 2023. Ce travail soutiendra, par ailleurs, la prochaine requête du Togo auprès du Partenariat mondial pour l’éducation (PME).
Dans cette perspective, le Togo s’est lancé dans la mise à jour de son analyse sectorielle du système éducatif (RESEN) puis de son modèle de simulation financière de l’éducation qui a permis d’apprécier les implications financières de différents scénarios de politique éducative et de retenir le scénario le plus soutenable financièrement au regard des défis que le pays doit relever pour atteindre l’Objectif de Développement Durable quatre et des capacités de mobilisation des ressources de l’Etat.
Le système éducatif togolais a pour objectifs majeurs de : i) garantir un enseignement de qualité pour tous avec des enseignant(e)s qualifiés ; ii) réguler les flux et améliorer la pertinence et la qualité de l’offre de formation professionnelle et technique afin d’élever le niveau d’employabilité des sortants et de contribuer eifficacement au développement économique et social du pays et iii) réduire les disparités qui existent, en matière d’éducation, entre les régions, les sexes, le milieu urbain et rural, les riches et les pauvres et les personnes en situation de handicap.
La feuille de route 2020-2025 du gouvernement a identifié le manque de cohérence et de synergie dans les actions menées dans les différents secteurs de l’éducation au Togo. Elle a suggéré l’élaboration d’une loi d’orientation sur l’éducation au Togo. Les textes d’un projet de loi d’orientation générale ont été élaborés mais aucune suite n’a été donnée à leur mise en œuvre.
En attendant, le système d’éducation reste confronté aux problèmes d’efficacité interne et externe.
Éléments d’un diagnostic : Problèmes et analyses
Une analyse des sources des difficultés rencontrées par l’enseignement au Togo est à mettre au compte de plusieurs incohérences. La première incohérence est liée à la philosophie qui sous-tend l’éducation. L’idée répandue en Afrique et au Togo est tout enfant a droit à l’enseignement. Pour le lui fournir, il faut vendre les ressources agricoles et minières pour lui assurer ce droit.
Mais dans les pays qui ont connu un développement économique, l’éducation conduit fondamentalement à un métier. Cette conception est en cohérence avec l’éducation traditionnelle en Afrique et la définition de l’éducation comme une socialisation au sens durkheimien du terme. En effet l’éducation doit non pas conduire à l’obtention d’un droit mais viser à préparer les jeunes à jouer un rôle dans la société.
Faire jouer à l’éducation son rôle social revient à considérer que l’éducation doit être prioritairement un moyen de formation à un métier dans la société. Au lieu de dire un enseignement pour tous, c’est plutôt un métier pour tous qui devait être privilégié. Ce métier doit être contextualisé en dotant le citoyen en valeurs et capacités pour transformer son milieu social.
C’est à travers son rôle social que l’éducation doit être conçue comme une œuvre sociale et collective. En effet, l’éducation est pensée collectivement à travers des mécanismes que sont des états généraux où les différentes composantes (élus, associations, services et acteurs) portent leurs préoccupations sur les besoins sociaux de l’éducation.
Ces différentes composantes traduisent les finalités en buts. La gouvernance a pour rôles de traduire ces finalités en buts et en objectifs généraux de l’éducation. Il ne saurait être question de laisser à la gouvernance éducation la mission de poser les bases philosophiques de l’éducation en cohérence avec la résolution des problèmes sociaux. Ce qui est le cas actuellement au Togo.
La seconde incohérence est en lien avec les instances impliquées dans la définition de la politique éducative. Depuis l’organisation des états généraux de l’éducation en 1992, aucun cadre n’a plus associé toutes les composantes de la société togolaise sur les questions éducatives. Seuls les services de l’administration publique proposent des stratégies conjoncturelles sur l’accessibilité à l’enseignement, son efficacité interne et externe. Les grands enjeux liés à la formation professionnelle, à l’enseignement technique, à l’alphabétisation ne sont pas pris en compte.
La troisième incohérence est liée à la difficulté à prendre en compte les besoins du citoyen, ceux de la communauté et du pays. Il s’agit de l’articulation des contenus à enseigner en lien avec les valeurs, la connaissance de son milieu de vie et ses besoins essentiels de santé, d’énergie, de sécurité et de production des biens agricoles, technologiques etc.
Solutions de rupture
- Recommandations sur l’éducation et la formation au Togo
- Philosophie éducative
Difficulté à faire admettre qu’aucun pays ne s’est développé sur la vente de ses ressources mais sur la formation professionnelle des citoyens et leur conscientisation comme force de développement.
Construire des dispositifs de formation tournés vers les besoins endogènes et sur la nécessité d’éduquer à la citoyenneté tournée vers le développement de notre pays.
Plaider pour la formation à la citoyenneté et à la transformation de nos milieux de vie et à la satisfaction de nos besoins.
- Instances de décisions
Difficulté à faire accepter que toutes réflexions sur les fondements de l’éducation soit un fait essentiellement social et non une exclusivité d’un gouvernement. Ce qui n’est toujours pas le cas.
Sensibiliser le citoyen sur la nécessité d’ouvrir et de participer aux débats réguliers sur l’éducation et la formation par l’organisation des états généraux de l’éducation.
Communiquer sur l’urgence d’une réflexion citoyenne sur les questions éducatives.
- Type de système éducatif
Difficulté à mettre fin et à sortir d’un système d’enseignement discriminatoire et élitiste sans prise sur le développement
Faire de l’éducation un droit et un droit permanent à satisfaire. Il s’agit de promouvoir et d’instaurer une éducation tout le long de la vie ;
Accroitre et diversifier les offres de formations.
Plaider pour l’instauration de dispositif qui garantisse au citoyen une éducation tout le long de la vie.
- Enseignement versus formation
Difficulté à construire un système d’enseignement technique et professionnel sur la base d’un principe un jeune, un métier.
Inverser l’offre de formation en privilégiant l’alphabétisation, la formation professionnelle et l’enseignement technique ;
Rendre attractifs l’enseignement technique et la formation professionnelle.
Sensibiliser les gestionnaires et les acteurs de l’éducation dans ce sens ;
Informer la population sur les nouveaux changements à opérer.
- Éthique et déontologie
La réduction de l’enseignement des valeurs morales dans l’enseignement et l’éducation au Togo
Promouvoir des modèles sociaux de méritocratie, de travail et de liberté ;
Étendre l’enseignement de la morale et de l’éthique à tous les niveaux de l’éducation.
Sensibiliser les gestionnaires et les acteurs sur les attentes en rapport avec l’acquisition des valeurs.
- École démocratique et inclusive
Difficulté à instaurer une éducation égalitaire et inclusive
Promouvoir une éducation égalitaire et inclusive ;
Créer les conditions d’une éducation égalitaire et inclusive.
Sensibiliser sur les valeurs de mérite, de travail et d’égalité des chances ;
- Financements et choix
Difficulté à réduire l’emprise des partenaires extérieurs sur le contrôle et la gestion du système éducatif Togolais
Réduire l’implication des interventions dans les décisions en matière de choix et d’orientation des stratégies de mise en œuvre de la politique éducative au Togo.
Élaborer et proposer des stratégies de mise en œuvre de la politique éducative du Togo à court, à moyen et à long termes.
Adopter un loi d’orientation sur l’éducation qui mette l’accent sur la formation technique et professionnelle, l’alphabétisation et l’enseignement général au Togo. Proposer une budgétisation conséquente des secteurs techniques et de l’alphabétisation fonctionnelle.
Sensibiliser les acteurs sur la nécessité de prendre le contrôle de l’élaboration de la politique éducative nationale et des stratégies qui en découlent.
B. RECOMMANDATIONS AU NOUVEAU CONTRAT CITOYEN AU TOGO
- Recommandations au Nouveau Contrat Citoyen au Togo en direction du citoyen
- Recommandations au Nouveau Contrat Citoyen au Togo en direction des familles
- Recommandations au Nouveau Contrat Citoyen au Togo